Il y a un laps de temps entre lequel les enfants commencent à dessiner et celui où on leur apprend à dessiner. J'ai pu remarqué en animant des ateliers de dessin avec de jeunes enfants que les outils communs du dessin d'architecture que l'on nous réapprend par la suite dans toutes les écoles d'architecture leur venaient tout naturellement, de façon presque instinctive. Lorsque je dis outils, je veux parler bien sûr de l'élévation, du plan, de la coupe, mais aussi de l'axonométrie frontale. Alors pourquoi ces outils ? Tout simplement sans doute parce que le but premier du dessin d'architecture est de donner le plus de détails et d'informations dans un même dessin, c’est un moyen d’expression basé sur la transmission claire d'une idée, mais aussi l'outil de travail pour un projet en cours de formation.
Après réflexion sur le type de programme que je souhaitais aborder avec les enfants, il m’a paru tout naturel de prendre pour sujet la maison, et parce que les rêves et les désirs sont les clefs d’un projet réussi, j’ai choisi la maison idéale. Tout mon travail est centré autour de l'expérience domestique, de la rénovation et de la réhabilitation de maisons anciennes : architectures vivantes, où l’on distingue les strates et stigmates dans des bâtiments à l’épreuve du temps, palimpsestes aux époques de construction superposées et entremêlées. Je crois en la maison comme en un champ des possibles, où la ruine est une joyeuse occasion, et la modification une belle opportunité. La maison individuelle, incarnée, aimée, choyée, c’est aussi et avant tout l’expression d’un individu. Nous avons donc commencé par le commencement du projet d’architecture : un désir porté par une personne en particulier, faisant la singularité si ce n'est l’âme de chaque maison. Ainsi donc, du premier dessin, en passant par l’apprentissage des couleurs, la représentation du projet en 2D sous forme d’estampe, au passage tridimensionnel en maquette, cet ensemble constitue les étapes nécessaires à la maturation et à l'épanouissement de chaque projet individuel.
Pour la dernière phase de la résidence, j’ai souhaité amener les enfants à réfléchir sur le vivre ensemble. Les individus d’un même groupe, lorsqu’ils se réunissent d'un commun accord, forment ensemble une micro-société. Plusieurs maisons individuelles, si elles se regroupent, deviennent un hameau, un village, une ville. Mais de telles structures ne peuvent exister sans un élan commun, tout au moins le désir de construire quelque chose ensemble. Par le biais d’un atelier dans la coure de l’école, chaque enfant apportant sa maison individuelle, nous avons jouer à créer ensemble la ville idéale, l’île autonome, où chaque projet initialement individuel aurait sa place. Cette donnée impliquait nécessairement des relations de voisinage, de mitoyenneté, la création de rues, de passages, d’espaces communs... enfin, tout ce que nous jugeons nécessaire au bon fonctionnement d'une ville médiévale, ou d'une île autonome (deux cas d'étude que nous avons choisis d'un commun accord). Cet atelier ludique sur la création des villes à été la clef d’entrée pour apprendre à voir l’architecture de façon critique et analytique, tout simplement une tentative pour comprendre le monde qui nous entoure et en valoriser la meilleure part.